Ce blog est entièrement consacré au polar en cases. Essentiellement constitué de chroniques d'albums, vous y trouverez, de temps à autre, des brèves sur les festivals et des événements liés au genre ou des interviews d'auteurs.
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Bonne balade dans le noir !

dimanche 26 janvier 2014

[Angoulême 2014] - Bédépolar repart à la chasse au Fauve Polar

Comme en 2013, Bédépolar a désigné un envoyé spécial - moi, quel bol ! - pour suivre la compétition officielle, surtout la sélection Polar, et ce Fauve en place depuis 2012 et parrainé par SNCF (non, j'ai pas oublié "la" : on dit plus "la" SNCF mais SNCF tout court, depuis quelques temps. Faut prendre le train de la modernité m'sieurs-dames). Alors, qui pour succéder à Simon Hureau ("Intrus à l'étrange", La Boîte à Bulles, 2012) et Anthony Pastor ("Castilla Drive", Actes Sud L'an 02, 2013) ? Au premier coup d'oeil, cela ne va pas être simple pour le jury, car les cinq albums en compétition sont tous de grande qualité. J'ai même parlé de quatre d'entre eux dans ces pages, c'est vous dire (oui, bon...). Voici la liste des heureux nominés :

Simon Roussin pour "Heartbreak Valley", aux éditions 2024 (le seul que je n'ai pas lu, mais il va falloir vite que je me rattrape), Benjamin Adam pour "Lartigues et Prévert" (La Pastèque), Lupano et Rodguen pour "Ma révérence" (Delcourt) Aaron et Guera pour le tome 8 de Scalped (Urban Comics / Dargaud) et Brüno pour "Tyler Cross" (Dargaud)
Tout ce beau monde défilera pour des rencontres avec le public sur l'espace polar SNCF, selon le planning suivant :
- Jeudi 30 janvier : 17h, Benjamin Adam
- Vendredi 31 janvier : 16h, Simon Roussin et 17h, Aaron et Guerra
- Samedi 1er Février : 16h, Brüno et 17h, Lupano et Rodguen

Et verdict dimanche en fin d'après-midi... et rendez-vous sur Bédépolar pour l'annonce du nom de l'heureux lauréat, juste après la proclamation officielle !



dimanche 19 janvier 2014

[Nouveauté] - Bonbons atomiques, d'Anthony Pastor (Actes Sud / L'an 02)

Sally Salinger s'entraîne au maniement des armes à feu : dans son métier, cela rassure les clients. Et puis, ces séances de tir, cela lui finira certainement par  la convaincre qu'elle l'exerce vraiment, ce métier de détective, dont elle est a hérité de son mari, disparu dans la nature... Ne manque plus qu'une affaire à résoudre pour assumer définitivement ce nouveau statut. Sally n'aura même pas à aller la chercher bien loin car elle se présente en la personne de Camilla Sweet, mère d'un copain de classe de son fils Jason. Car ce n'est pas pour les rfelations entre les deux ados - comme le pensait d'abord Sally - que Madame Sweet vient aborder madame Salinger dans les vestiaires du "Trituro Fitness." Non, c'est parce que madame Sweet soupçonne monsieur Sweet d'être sur le point de la tromper avec cette nouvelle assistante, qu'il vient d'embaucher. Voilà donc Sally Salinger sur sa première vraie enquête : un adultère à constater. Du classique pour une détective. Mais, en commençant à s'intéresser de près à la vie de Douglas Sweet, patron de la plus grosse entreprise de la ville, premier pourvoyeur d'emploi de la cité, et potentiel candidat à la mairie, Sally ne sait pas trop ce qu'elle va mettre au jour. Ni jusqu'où cela va la mener...
On retrouve dans ce "Bonbons atomiques", les personnages créés par Anthony Pastor dans "Castilla Drive", pour une histoire qui se déroule un an et demi après celle de ce premier titre, paru en 2012. Sally Salinger en est toujours la figure centrale, et est toujours cette mère de famille inquiète pour ses deux ados -  très présents dans cet album - et qui n'a que ce métier de détective, encore nouveau pour elle, pour s'en sortir. Elle peut aussi compter sur Oswaldo, son poète amoureux, homme aux ressources insoupçonnées, comme on s'en rendra compte au fil des pages. L'ombre de Robert Salinger, furtivement aperçu dans "Castilla drive", plane également : est-il définitivement parti ou faut-il s'attendre à un autre retour ? C'est dans ce décor familial somme toute pesant qu'Anthony Pastor vient injecter une intrigue où d'autres personnages tout aussi forts surgissent : Douglas Sweet, homme d'affaires avisé mais surtout tourmenté par le comportement de Gabriel, son fils, un ado qui lui échappe peu  à peu, et est plus passionné par le skate que par les affaires de son père. Camilla Sweet, femme de Douglas, celle qui va tout déclencher : une épouse perdue devant le comportement étrange de son mari, mais tenace dans sa quête de vérité. Et enfin, Gabriella, la jeune assistante de Douglas, une belle femme mystérieuse dont Sally va vite découvrir la double identité.. et bien plus encore. Tout ce beau monde va entrer dans une sarabande à l'issue plus qu'incertaine, et comme dans "Castilla drive", c'est le petit univers de Sally Salinger qui va se trouver bouleversé. 

Avec "Bonbons atomiques", Anthony Pastor développe intelligemment cet univers et prend encore plus son temps (l'album fait 100 pages de plus que le précédent !) pour rendre crédible les relations humaines qu'il décrit. Et c'est passionnant, car non seulement sa trame policière accroche le lecteur (avec comme fil rouge Gabriella et son passé) une vraie tension montant au fur et à mesure que l'on approche du dénouement, mais aussi réussit-il à susciter une vraie empathie pour tous ses personnages... même les moins sympathiques. Une fois de plus, Anthony Pastor se montre un admirable conteur, et prendre ses "bonbons atomiques", c'est comme être propulsé en plein Trituro, et s'attendre à voir débouler Oswaldo, le poète, prêt à nous payer  une bière pour refaire le monde. Ou Ray, le flic, nous demander ce qu'on fout là. On répondrait alors qu'on cherche Sally Salinger, une femme à qui on aimerait bien confier une enquête. Ou ses états d'âmes. 

Bonbons atomiques
Texte et dessin d'Anthony Pastor
Actes Sud / L'an 2, 2014 – 254 pages couleur -
21,80 €

samedi 11 janvier 2014

[Coup de fil] - Snapshot, par Diggle et Jock (Urban comics)

Jake Dobson fait du vtt au Golden Gate Park à San Francisco. La conduite sportive de son engin ne l'empêche pas de repérer dans l'herbe du parc, un truc qui brille. Un téléphone portable dernier cri. Jake s'arrête et le ramasse, avec dans l'idée d'y jeter un coup d'oeil plus tard. Là, l'urgence est plutôt de filer ouvrir la boutique de comics qu'il tient en l'absence de son patron. Et déjà, Steve, le plus fidèle client de "Nearmint Rhino" est là, à faire le pied de grue devant la librairie. Une conversation plus tard, le voici déjà parti, et c'est le moment que choisit Jake pour regarder de plus près ce portable high tech trouvé en chemin. Et là, c'est plutôt pire que dans les comics : dans la galerie de photos, un homme allongé sur le sol. Une balle dans la tête et un doigt coupé. Dobson n'hésite pas une seconde et prévient les flics. Un dénommé Warren, de la section homicides déboule bientôt et demande si quelqu'un d'autre a touché au téléphone. A ces mots, tel Peter Parker alerté par son sens de l'araignée, Jake flaire la question piège, le coup foireux... Il file par la porte de derrière et s'enfuit à toutes jambes dans la rue. Jake Dobson ne le sait pas encore, mais il va avoir beaucoup de monde à ses trousses dans les heures à venir...

 
Diggle et Jock sont les auteurs de la série survitaminée "Losers" (aussi chez Urban Comics) où des agents "black op" de la CIA sont lâchés par leurs patrons et luttent pour leur réhabilitation. Une série où l'action prime, et qui fut adaptée au ciné en 2010. Ce "Snapshot" fait aussi forte impression, côté rythme soutenu du récit et coup d'éclats graphiques : à partir du moment où le jeune héros empoche le mystérieux portable, c'est le début d'un engrenage infernal, qui va l'entraîner dans une histoire assez dingue, avec cadavres à la pelle. Mais si, visuellement le lecteur est vite happé par le dessin nerveux de Jock et son noir et blanc aux portes de l'angoisse, il l'est aussi, le lecteur, pris par l'histoire de Diggle : qui est ce cadavre vu par Jake ? Pourquoi un doigt coupé ? Qu'est cette mystérieuse société, seul contact dans le portable ? Une boite d'analystes financiers ? Mais depuis quand les banquiers emploient-ils des tueurs à gages ? Voilà le genre de questions qui vont déferler dans le crâne du pauvre Jake Dobson, et qui n'aura pas beaucoup de temps pour tenter d'y répondre. 

"Snapshot", comme le confesse Andy Diggle dans la postface de cet album, était à l'origine plutôt un scénario de film. Mais quand il l'a montré à Jock, celui-ci lui a répondu : "Tu sais, ça ferait un super comic-book ! J'adorerais le dessiner". Ces deux-là ont bien fait de s'entendre sur ce projet. Snapshot est en effet un superbe "one-shot". Et une vraie bande dessinée noire. C'est tout de même rare, du côté des "crime comics".

Snapshot
Scénario Andy Diggle et dessin Jock
Urban comics, 2013 - 144 pages noir et blanc - 15 €