Ce blog est entièrement consacré au polar en cases. Essentiellement constitué de chroniques d'albums, vous y trouverez, de temps à autre, des brèves sur les festivals et des événements liés au genre ou des interviews d'auteurs.
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Bonne balade dans le noir !

dimanche 29 mai 2011

[Festival] - Goéland Masqué, onzième !

Parmi les festivals de polar qui n'hésitent pas à ouvrir leurs portes à la bande dessinée, celui du Goéland Masqué à Penmarc'h, dans le Finistère, mérite d'être signalé. Non seulement il est en Bretagne (oui, bon, d'accord...), mais surtout il innove en proposant, à partir du jeudi 9 juin de 22 H à 1 H , rien de moins qu'une « PERFORMANCE SUR METAL HURLANT ». De quoi s'agit-il ? Le programme est clair : c'est un « Travail au plasma du sculpteur Marc MORVAN qui réalise une BD de Jean François MINIAC sur une page de fer de 3m x1,50m (place Auguste Dupouy à Saint-Guénolé). L’activité se poursuivra tous les soirs durant le festival ».
Pour se remettre de ces émotions visuelles, quoi de mieux qu'une conférence par un de nos meilleurs histoiriens de la BD, Patrick GAUMER. Sujet du jour : « L’adaptation de la littérature Noire en BD : Mariage d’amour ou de raison ? » - C'est le Samedi 11 juin à 16h30, à la Salle Cap Caval

Et le même jour, à 18 H 30, c'est l'heure de la remise des Prix du festival, dont celle du Prix Mor Vran de la BD noire , qui va cette année à GIROUD, LAPIERE et Ralph MEYER pour leur superbe "Page noire" (Futuropolis). Après Polar Encontre en mars, voici donc un autre prix pour cet album dont Bédépolar ne vous a pas encore parlé... et il va être temps que Bédépolar se mette à jour. La chronique dans ces pages très bientôt !
Et, tradition festivalière oblige, vous pourrez aussi aller à la rencontre des dessinateurs, cette année : BIBEUR LU, BLYNT, BRIAC, Pierre Henry GOMONT, JULES ET TOM, Christophe LAZE, Malo LOUARN, Jaime MARTIN, Ralph MEYER et Chantal MONTELLIER.
Voilà. Tout cela se passe 11 au 13 juin à Penmarc'h, dans un chouette cadre, avec plein de gens sympathiques. Le moment ou jamais de passer un week-end au grand air du large !

mercredi 18 mai 2011

[Chronique] - The Last days of american crime

Les Etats-Unis ont trouvé la parade pour contrer durablement la délinquance : exit le billet vert. En supprimant définitivement le papier-monnaie, les dirigeants espèrent annihiler aussi toute tentative de vouloir s'en mettre plein les poches de manière illégale. Les billets seront remplacés par des cartes chargées par des machines, propriété du gouvernement... Graham Bricke, pro du crime, s'est fait engager à la sécurité d'une des banques fédérales chargées de la collecte du cash et de leur remplacement par les cartes fiduciaires. Ayant trouvé le moyen de voler une des futures machines gouvernementales grâce à son job, il recrute une équipe de trois personnes pour ce qui sera son ultime casse. Mais il va falloir faire vite, car le gouvernement a sous le coude une autre arme, plus que dissuasive : l'Initiative de Paix Américaine ou IPA. Derrière ces trois lettres se cache une gigantesque opération de lobotomie collective : un signal agissant directement sur le cerveau et annihilant toute volonté d'action illégale va être émis, dans les jours. Le compte à rebours commence alors pour Bricke et ses acolytes...

Cette trilogie apocalyptique est l'une des meilleures mini-séries parues l'an passé aux Etats-Unis, publiée par un éditeur un peu à l'ombre des mastodontes du comics, Radical Publishing. Son auteur, Rick Remender qualifie cette série de « polar hardcore avec un contenu anarchiste ». Et c'est vrai que son scénario assez barré, construit sur un compte à rebours approchant de la date fatidique de l'envoi du fameux signal, ne pouvait déboucher que sur une histoire violente et spectaculaire. Et il fallait en effet ce dessinateur-encreur-coloriste de grand talent qu'est Greg Tocchini pour mettre en images les scènes-chocs imaginées par Remender. Ses fusillades sont de vrais morceaux d'anthologie, ses femmes sont sublimes – et surtout Shelby, la femme fatale dans toute sa splendeur – et ses couleurs chaudes et poisseuses à la fois rendent l'atmosphère irrespirable. Juste ce qu'il fallait en tous cas pour sortir de la lecture avec la sueur au front... et le plaisir coupable de voir que, finalement, le crime paie. Les trois couvertures, signées Alex Maleev sont splendides, et, cerise sur le gâteau, ces éditions françaises sont agrémentées de cahiers graphiques reprenant crayonnés, études de personnages et couvertures, quelques pages supplémentaires de bonheur
The last days of american crime, tomes 1 à 3
Scénario Rick Remender et dessin Greg Tocchini
EP, 2010-2011 – 64 pages couleurs et 14,95 € chaque

vendredi 13 mai 2011

[Plop plop] - Tontonlogie flingueuse de A à Z

En 61 entrées, de « Audiard » à « Volfoni (Achille et Salvatore) », un quizz dont le degré de difficulté des questions s'échelonne de « Pour l'amateur de base » à « Pour les apôtres du culte », et pour finir, une présentation de 8 autres films nettement moins célèbres mais tous dialogués par Audiard, voici un bouquin extrêmement sympathique sur un film qu'on ne présente plus. Grâce à lui, vous saurez désormais qui était initialement prévu à la place de Ventura pour le rôle de Fernand, ou qui a déclaré « J'ai tourné dans tellement de navets qu'on pourrait cultiver un jardin » (je vous laisse deviner) ou encore quel était le titre imaginé un temps par Audiard et Lautner. Par exemple. Evidemment, tous les acteurs principaux sont au générique, avec des notices proportionnelles à leur importance dans le film, et évidemment, les plus emblématiques sont croqués par Géga, dont le talent de caricaturiste fait merveille. Mais la plus grande réussite de ce livre est d'avoir, comme l'explique en s'excusant presque Stéphane Germain dans son introduction, pris le parti de dessiner les Flingueurs « comme si des scènes coupées au montage avaient miraculeusement refait surface ». Et ça marche ! Les dialogues sont tellement réussis qu'on dirait des vrais, et qu'on se demande comment on a pu les oublier... Mais un bon dessin vaut mieux que, etc... alors, voyez plutôt :
Ce dico, d'un vrai amoureux du film – et aussi spécialiste du cinéma d'Audiard – est à offrir à tous les fans des Tontons Flingueurs, qui replongeront avec délice dans les aventures du gugusse de Montauban.

Dans le même registre, ou pas loin, un très bel album de fausses affiches des films de Lautner, réalisées par 24 dessinateurs parmi lesquels Boucq, Gibrat, Cromwell, Cuzor, Coutelis... est sorti au Lombard en 2007. Je ne résiste pas à vous reproduire ici celle de Maëster pour les Tontons Flingueurs, elle aussi dans le style caricatural. Dans ce « Lautner s'affiche », chacun des 24 films est présenté avec une courte fiche technique, accompagnée d'un long texte de commentaires de Philippe Chanoinat, dont on peut simplement regretter une certaine constance dans le dézingage des « clapoteurs de bouche » (c'est à dire : les intellos et/ou les médias qui n'ont pas compris le génie lautnérien)... On a l'impression que tous les films présentés sont des chefs d'oeuvre, ce qui laisse parfois perplexe. Mais il ne faut pas bouder le plaisir des images : les affiches réalisées sont (presque) toutes réussies, et les trois ou quatre autre dessins qui les accompagnent réussissent à créer une ambiance assez proche de celle des films illustrés.

Voilà. Le festival de Cannes vient d'ouvrir. C'est le moment d'aller s'en jeter un à la mémoire de Raoul...

Le Dico des Tontons Flingueurs
Textes Stéphane Germain ; illustrations et bulles Géga et Stéphane Germain
Desinge & Hugo & Cie, 2011 - 87 pages couleur - 12,95 €

Lautner s'affiche
Textes Philippe Chanoinat et dessins... de 24 dessinateurs.
Lombard, 2007 – 54 pages couleurs – 13,95 €

dimanche 8 mai 2011

[Chronique] - Parker est de retour !

Parker a changé de visage : une opération de chirurgie esthétique était la seule solution pour échapper à l'Organisation. Mais celle-ci est puissante et elle réussit tout de même à le localiser. Elle lui envoie aussitôt un tueur, qui trouve le moyen de rater une exécution à priori tranquille : la cible était au lit, endormie... Mais Parker, aux réflexes de prédateur, échappe au traquenard et fait vite cracher le morceau au porte-flingue, qui lui donne un premier nom. Grâce à lui, Parker va remonter la filière et entreprendre un nettoyage en règle de la puissante mafia locale. Celle-ci n'a pas l'air de se rendre compte de la rage qui anime leur ennemi, comme en témoigne ce dialogue :
Fairfax (pas loin du sommet dans l'Organisation) : « J'ignore ce que vous espérez en faisant tout ça. Vous continuerez à nous irriter et nous à vous traquer. L'issue est inévitable ».
Parker (calme) : « Erreur. Ce n'est plus vous qui me traquez. C'est moi qui vous traque. Je traque Bronson ».
Et il n'a pas l'air de rigoler...

Cette adaptation des romans de Stark mettant en scène Parker, après « Le Chasseur », est celle du deuxième titre de la série, « Peau neuve » ou « Parker fait peau neuve » selon les différentes éditions françaises (The man with the getaway face, 1963) mais également, et surtout, du troisième titre, "La Clique", dont la BD originale partage le titre : "The Outfit", sorti en 1964.
Après
Benacquista, c'est Doug Headline qui s'est chargé de la traduction de ce tome, en excellent connaisseur des comics qu'il est... et du polar. Et comme pour « Le Chasseur », le travail de Darwin Cooke est tout simplement magnifique, ses choix graphiques sont même encore plus audacieux que pour le premier tome. La meilleure preuve en est le « livre trois » de cette histoire (qui en compte quatre) où, en 30 pages, Cooke utilise quatre style différents pour illustrer les activités illicites de l'Organisation, et comment Parker va à chaque fois arnaquer la société criminelle. Cooke n'hésite ainsi pas à intégrer de grandes parties narratives, issues directement du roman, comme ce « Raid sur le club Cookatoo », qui se lit comme un long reportage à sensation : 6 pages de textes illustrées de 5 dessins qu'on jurerait croqués en direct, dans un impeccable style sixties. Comme pour « Le Chasseur », l'album est en bichromie gris/bleu – blanc, ce qui empêche tout effet inutilement spectaculaire, mais n'empêche en aucun cas de sentir la violence, insidieuse ou réelle, tapie dans l'ombre ou explosant dans les poings du "héros", et qui suinte tout au long des pages. Une vraie leçon aux distributeurs d'hémoglobine. Et comme l'intrigue de ce deuxième Parker est d'une solidité à toute épreuve – et si elle semble avoir été déjà lue, il ne faut pas oublier qu'elle date de 1963 – vous aurez compris que vous devez absolument lire cet album.
Parker, tome 2 - L'Organisation
Scénario et dessin : Darwin Cooke d'après Donald Westlake
Traduction Doug Headline
Dargaud, 2011 - 160 pages en bichromie – 19 €